Nous avons demandé au Dr Arazi, Président d’Alerte Phonegate de revenir en détails sur les révélations faites le 21 août 2019 par le journaliste et prix Pulitzer Sam Roe dans le Chicago Tribune et de les restituer dans le contexte global du scandale international du Phonegate. Nous débutons avec les résultats des iPhone d’Apple, puis dans un prochain article nous évoquerons les résultats du constructeur coréen Samsung.

Quand et comment s’est fait le contact avec le journaliste Sam Roe ?

Cela remonte maintenant à plus d’un an et demi. J’ai reçu un mail en janvier 2018 de Sam Roe du Chicago Tribune me demandant une interview. Il avait pris connaissance des résultats des tests de débit d’absorption spécifique (DAS) réalisés sur des centaines de téléphones portables par l’Agence nationale des fréquences (ANFR) dont nous avions au mois de juin 2017 obtenus une première publication.

Mail de Sam Roe au Dr Arazi le 29 janvier 2018

C’était un moment incroyable de voir qu’un reporter aussi prestigieux et titré que Sam Roe (prix Pulitzer) s’intéressait à notre action d’alerte internationale. Nous avons ainsi continué à échanger par mail, de manière régulière pendant des mois en lui envoyant toutes les informations que nous jugions importantes.

Nous n’avons jamais su que le Chicago Tribune avait fait le choix de tests indépendants. Toutefois, nous trouvons beaucoup d’intérêts à ces tests qui sont complémentaires aux tests réalisés par l’ANFR. Nous y reviendrons.

Que montrent les tests de DAS des iPhone réalisés par l’ANFR ?

Pour analyser les résultats nous devons les scinder en deux périodes, 2012-2016 et 2017 à nos jours. En effet, c’est dans la 1ére période que l’ANFR a décidé de contrôler l’exposition de tous les téléphones portables au niveau du corps (DAS tronc, DAS membres), à la distance de mesure du fabricant (entre 10 et 25 mm de la peau), puis à 5mm (quasi contact) et enfin à 0mm (contact), et ce pour être le plus proche des usages des utilisateurs, lorsqu’il est porté à la main (contact) ou mis dans une poche (quasi contact).

En usage réel le DAS de l’iPhone 5 à plus de 5 W/kg

Prenons, pour exemple, l’iPhone 5, testé par Apple à 10 mm, le DAS tronc officiel ressort à 0,825W/kg pour 10gr. Puis testé à 5mm, il ressort à 1,453 W/kg. Et enfin testé au contact, le DAS bondit à 5,321 W/kg pour 10gr soit plus de deux fois et demi la limite à ne pas dépasser (2W/kg) en Europe.

Tableau extrait de l’open data ANFR

C’est la même chose pour les tests des iPhone 5C (3,11W/kg), 6 (2,05W/kg),6 Plus (3,17 W/kg) et  6S (2,59W/kg).

Concernant l’iPhone 7, testé par l’ANFR en mai 2016, l’agence française n’a pas fait de tests à 0 mm. Nous nous en étions d’ailleurs étonné auprès d’eux. Le test de contrôle à 5 mm ressort à 1,34 W/kg pour 10gr.

Et concernant l’iPhone SE testé en septembre 2016 au contact c’est le seul à ne pas dépasser la limite européenne avec un DAS de 1,74 W/kg pour 10gr.

Depuis 2017 plus de publication des DAS en usage réel

Alors que comme l’exige la Directive européenne 2014/53/UE, l’ANFR doit tester les DAS membres au contact du corps, celle-ci ne publie plus dans la période 2017 à nos jours les résultats de DAS au contact. Concernant les 4 contrôles effectués ces deux dernières années, sur les iPhone 8, X, XR, XS, tous apparaissent comme en-dessous des limites de 2W/kg pour le tronc et de 4 W/kg pour les membres.

Tableau extrait de l’open data ANFR

Quelles comparaisons peut-on faire entre les tests de l’ANFR et ceux du Chicago Tribune ?

Tout d’abord qu’ils confirment, sans doutes possibles, que la distance autorisée par la réglementation internationale pour assurer la sécurité des utilisateurs est tout à fait défaillante. Depuis 30 ans la distance retenue pour faire les certifications et les contrôles est tout à fait inappropriée par rapport à nos usages pour protéger notre santé.

La réglementation introduite par la Federal communication commission (FCC) en 1996 est plus exigeante que nos normes européennes ou internationales qui se basent sur les recommandations de l’ICNIRP, en effet :

  • Le niveau de DAS tête et tronc autorisé est inférieur 1,6W/kg au lieu de 2W/kg
  • L’exposition est calculée sur 1gr de tissu pour 10gr en Europe
  • Le temps d’exposition pour le DAS membre est de 30mn comparé à 6mn ailleurs

Ceci a des conséquences tout à fait importantes sur notre niveau d’exposition réels en Europe. Dans un article récent, paru en avril 2019 dans la revue IEEE, le Pr Om Ghandi, après analyse des résultats des tests de l’ANFR a pu confirmer que la différence d’exposition entre 1gr et 10gr augmente entre 2,5 et 3 fois la valeur de DAS pour l’utilisateur.

Pour exemple, l’iPhone 5 testé à 0mm se situe pour 10gr à 5,321 W/kg et pour 1gr entre 12 et 15 W/kg soit plus de 6 à 7 fois la valeur à ne pas dépasser.

A 2 mm, le DAS de l’iPhone 7 mesuré à plus de 7 W/kg

Par ailleurs, les résultats obtenus pour l’iPhone 7 posent de nombreuses questions. En effet, lors du contrôle effectué par l’ANFR en mai 2016, ce dernier présente un niveau de DAS à 1,34 W/kg pour 10 gr pour un test à 5mm du corps.

Or, les 4 iPhone testés par le Chicago Tribune présentent tous que ce soit pour les tests standards ou modifiés des niveaux de DAS bien supérieurs à la normale. Qui plus est les tests réalisés à la distance de 2mm présentent des écarts encore plus importants que ceux révélés par l’ANFR.

Quelle serait votre conclusion provisoire?

Tout d’abord que nous sommes bien face à des preuves répétées de tromperie de la part d’Apple. En effet, pour se défendre des révélations du Chicago Tribune, le constructeur à la pomme a immédiatement contesté la pertinence des tests réalisés, pourtant conduits par une entreprise experte agréée par la FCC.

Seulement voilà, Apple ne peut absolument pas mettre en cause les résultats des tests de l’agence française qui montrent, eux aussi, des résultats du même ordre. Résultats qui lui ont été communiqué par l’ANFR.

Ainsi sollicité par le journaliste Pierre le Hir du journal le Monde pour son article «soupçons sur les ondes des téléphones portables», les responsables d’Apple France «n’ont pas souhaité faire de commentaire.». (Lire l’article ci-dessous du 23 décembre 2016)