Une étude récente présentée par le Dr De-Kun Li lors de la 35e Conférence annuelle de la Société internationale d’épidémiologie environnementale à Santiago, Chili, en 2024, suggère un lien potentiel entre le port régulier des téléphones portables dans nos poches de pantalons et l’augmentation des cas de cancer colorectal chez les jeunes adultes. Cette recherche s’inscrit dans le contexte plus large du scandale « Phonegate », révélé en 2016 en France, concernant le dépassement des normes d’exposition aux ondes électromagnétiques de nos téléphones portables.
Résultats de l’étude du Dr Li
L’étude pilote du Dr Li, conçue pour examiner 50 cas d’EOCRC* et 50 cas contrôles appariés, a révélé des résultats intéressants :
- Les personnes portant un téléphone portable sous la taille étaient quatre fois plus susceptibles de développer des tumeurs.
- Le lien était particulièrement fort lorsque le téléphone était porté du même côté que celui où la tumeur s’est développée.
- Ceux qui portaient un téléphone sur le côté gauche pendant plus de 30 000 heures (environ 10 ans) étaient 12 fois plus susceptibles de développer une tumeur de ce côté du côlon.
- Le risque était significativement plus élevé pour le port ipsilatéral (même côté) que pour le port contralatéral (côté opposé).
Le Dr Li souligne : « Le contraste frappant entre une forte association avec le port ipsilatéral et, en grande partie, l’absence de lien avec le transport contralatéral est la découverte la plus notable. »
Avis divergents dans la communauté scientifique
Kurt Straif, ancien chef de section au Centre de recherche internationale sur le cancer (CIRC), exprime auprès de Louis Slesin, rédacteur en chef de Microwave News son scepticisme envers l’étude du Dr Li, la qualifiant de « petite étude » rapportant des associations invraisemblables avec de larges intervalles de confiance. Il estime que les facteurs de risque actuels du cancer colorectal chez les jeunes restent plausibles, et que le moment de l’augmentation des cas ne correspond pas à l’utilisation généralisée des téléphones portables chez les jeunes.
Il convient de noter que selon Microwave News, Straif a également des liens avec ISGlobal, un institut espagnol bien connu d’Alerte Phonegate. Notre enquête sur la controversée étude Mobikids a révélé que le financement d’ISGLOBAL transitait par une fondation bancaire « La CAIXA » dont les principaux revenus sont liés à l’industrie de la téléphonie.
Cependant, comme le rapporte Microwave News, le Dr Li défend ses résultats en soulignant l’importance de la différence frappante entre les risques ipsilatéraux et contralatéraux, ainsi que la coïncidence temporelle entre l’adoption massive des téléphones portables et l’augmentation des cas de cancer colorectal chez les jeunes adultes.
Rebecca Siegel de l’American Cancer Society remet également en question les conclusions de Li, notamment sur la chronologie. Elle souligne que les taux de cancer colo-rectal augmentent depuis les années 1970-1980 chez les 20-30 ans, bien avant l’adoption massive des téléphones portables dans les années 2000.
Le Dr Li conteste ces critiques, arguant que l’utilisation des téléphones portables a commencé à décoller dès le milieu des années 1990 et que le grand saut dans les taux de cancer colorectal précoce s’est produit plus tard que suggéré.
Comme le montre les tendances présentées dans la revue JAMA Open (2019) de l’incidence de la CRCO au Canada pour les hommes et les femmes ci-dessous avec une nette augmentation à partir de la fin des années 1990 et au début des années 2000.
Implications pour la recherche future et la santé publique
Ces résultats bien que faisant débat, combinés aux révélations du Phonegate, soulignent la nécessité pour les utilisateurs de téléphones portables d’adopter une approche prudente concernant leur exposition aux ondes.
Le Dr Marc Arazi, président de l’ONG Alerte Phonegate, commente :
« L’étude du Dr Li, dans le contexte du Phonegate, renforce notre appel à la communauté scientifique et aux autorités réglementaires pour une réévaluation urgente des normes d’exposition aux radiofréquences. Il est crucial d’explorer plus en profondeur ce lien potentiel tout en tenant compte d’autres facteurs de risque.«
En attendant des recherches plus approfondies, il est recommandé aux utilisateurs de téléphones portables, en particulier aux jeunes adultes, de prendre des précautions pour limiter leur exposition aux radiofréquences. Cela peut se faire en utilisant le mode haut-parleur ou des écouteurs filaires et en évitant de porter leur téléphone directement sur le corps, comme dans une poche de pantalon.
La santé publique doit considérer tous les facteurs de risque potentiels liés aux nouvelles technologies, y compris ceux mis en lumière par le Phonegate. C’est seulement ainsi que nous pourrons espérer inverser la tendance inquiétante des cas de cancer colorectal chez les jeunes adultes et assurer une utilisation plus sûre des technologies mobiles.
Pour plus d’informations sur cette étude et ses implications, consultez l’article complet sur Microwave News.
*Early-onset colorectal cancer (cancer colorectal précoce)
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