Dans cette Tribune publiée sur le blog de Mediapart nous interpellons le Gouvernement qui néglige les dangers pour la santé des expositions aux ondes de la téléphonie mobile.

 

En effet, deux ans après les recommandations de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) dans son rapport « Phonegate » et les engagements pris à la suite par le Gouvernement, rien ou presque n’a été fait pour mieux protéger la santé des utilisateurs de téléphones portables. L’épidémie de Covid 19 n’excuse rien.

C’est le triste constat porté par notre association Alerte Phonegate et les plus de 15 500 citoyens signataires de notre pétition. Nous réclamons ensemble des avancées concrètes et tout particulièrement pour, les enfants, les femmes enceintes et les personnes souffrant d’électro hypersensibilité.

Ainsi l’ANSES dès son rapport de 2016, puis à nouveau en 2019 mettait en garde les pouvoirs publics sur le manque de fiabilité de l’indicateur DAS (débit d’absorption spécifique) en termes de santé publique.

Plus encore, l’Agence confirmait la nécessité de :

  • Retirer du marché ou mettre à jour les téléphones portables mis sur le marché avant juin 2017 et dont les tests réalisés par l’ANFR montrent un dépassement de DAS. Ce qui représente plus de 250 modèles différents de toutes marques dont nous demandions déjà en juin 2018 le retrait dans notre « Appel de Paris ». Cette demande devant s’appliquer en France mais aussi au niveau Européen.
  • Mesurer le DAS corps au contact direct de la peau et donc en usage réel. Les fabricants, aidés par les régulateurs des télécoms de 1995 à 2015 portent une lourde responsabilité dans des mesures de DAS faites entre 10 et 25 mm de la peau, comme en lévitation ! Le tout ayant permis aux industriels de surexposer tous les utilisateurs pour privilégier la puissance et donc une meilleure ergonomie de leurs produits.

Nous les avions alertés sur ces enjeux sanitaires à de multiples reprises, en leur écrivant, en publiant une lettre ouverte dans le magazine Marianne, lors d’un rendez-vous en janvier 2020 au cabinet de Mme Agnès PANNIER-RUNACHER, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Économie et des Finances.

Qu’a fait depuis deux ans ce Gouvernement ? A-t-il, comme annoncé, organisé la table ronde avec les industriels de la téléphonie mobile ? A-t-il fait aboutir sa demande à la Commission européenne d’un changement des mesures du DAS tronc au contact de la peau ? Leur a-t-il communiqué la liste des 28 modèles de téléphones portables avec dépassements de DAS pour les sanctionner au niveau européen ? A-t-il écouté les lanceurs d’alertes ?

Eh bien non !

Et l’épidémie de COVID 19 n’excuse rien, bien au contraire. En effet, le Gouvernement a su mettre des moyens de communication exceptionnels pour inciter la population à des mesures de protection face au virus, brandissant le principe de précaution. Alors pourquoi pas pour cet autre enjeu de santé publique qui affecte des millions de Français ?

En effet, les malades de cancers les plus graves du cerveau, les glioblastomes ont été multipliés par 4 en 30 ans (source Santé Publique France), les risques d’infertilité masculine touchent de plus en plus de jeunes, et près de 3 millions de personnes souffrant à des degrés divers d’électro-hypersensibilité (source ANSES) sont complètement ignorées et abandonnées.

Dans ce contexte, la récente annonce mettant un terme à l’obligation réglementaire de fournir un Kit mains-libres lors de la commercialisation d’un smartphone est un nouveau cadeau fait aux fabricants. Les victimes des ondes et les consommateurs sont bafoués. Nous sommes indignés, qu’en pleine COP 26 les parlementaires à l’initiative du sénateur Patrick Chaize, instrumentalisent la cause environnementale.

C’est d’ailleurs l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), en s’appuyant sur des études similaires du Centre international de recherche sur le Cancer (CIRC) qui a classé en 2011, il y a 10 ans, les ondes de la téléphonie mobile (téléphones portables, Wifi, antennes-relais, etc.) comme « possiblement cancérogènes » pour l’homme (classe 2B).

Des recherches qui ont montré qu’une utilisation d’un téléphone portable pendant 30 minutes chaque jour pendant 10 ans augmentait le risque d’apparition de tumeurs malignes (gliomes), de tumeurs bénignes mais invalidantes (neurinomes de l’acoustique), …

Autant dire que tout le monde est concerné : ceux qui utilisent leur mobile par obligation professionnelle comme ceux qui sont soumis à une addiction, dont les jeunes représentent une part importante.

Pire encore, dans ce contexte qui ne lui est pas inconnu, ce Gouvernement n’a pas hésité à lancer à marche forcée la 5G. Rien, pas même l’ANSES, ne doit freiner le développement inéluctable vers cette nouvelle technologie qui va augmenter de manière exponentielle notre niveau d’exposition aux ondes.

D’ailleurs comment le pourrait-il ? L’État étant une fois encore en parfait conflit d’intérêt, avec d’un côté la vente pour près de 3 Milliards d’euros de certaines fréquences 5G aux opérateurs, et de l’autre la quasi-obligation de mettre l’ensemble des ressources de l’État au service du développement des réseaux de téléphonie mobile.

Un terrible constat qui voit même l’ensemble de la règlementation et des lois se mettre au diapason des seuls intérêts des industriels. Ces derniers n’ayant pas manqué en parallèle de prendre possession, ces dernières années, du capital des principaux médias (TF1, BFMTV, Le Monde, …). Une machine infernale qui met en danger la capacité à s’appuyer sur le rôle de contre-pouvoir des médias.

Nous n’entendons pas baisser les bras et, dans ce combat, nous affirmons notre détermination, celle de nos adhérents et de nos pétitionnaires, pour demander au Gouvernement :

  • De retirer enfin les plus de 250 modèles du marché mis sur le marché avant juin 2017 et présentant des DAS dangereux pour la santé;
  • D’obtenir de la Commission européenne sans plus de délai une mesure du DAS tronc au contact du corps;
  • De revoir l’intégralité des normes encadrant la téléphonie mobile en s’appuyant sur un groupe d’experts réellement indépendants ;
  • De mettre en place une règlementation pour un usage sûr des téléphones portables reconditionnés ;
  • De surseoir à la mise sur le marché des smartphones 5G tant que les protocoles d’exposition des utilisateurs ne seront pas au point pour protéger leur santé ;
  • De mener des enquêtes indépendantes sur les effets sanitaires de la 5G ;

Nous dénonçons publiquement ce déséquilibre flagrant dans les décisions prises pour favoriser les industriels de la téléphonie mobile. Sans un sursaut gouvernemental et une prise de conscience des enjeux sanitaires, nous serions contraints, en conscience et sans délai, à engager la responsabilité de l’État et des ministres concernés face à ce scandale sanitaire.