Nous avons déjà souligné à de multiples reprises que le DAS (débit d’absorption spécifique) n’offrait en aucun cas une protection suffisante et que ses normes, tant européennes qu’internationales, ont permis aux industriels de la téléphonie mobile de surexposer tous les utilisateurs de téléphones mobiles depuis 30 ans, privilégiant la connectivité des terminaux à la santé publique. Pourtant, l’Agence nationale des fréquences (ANFR), loin de remettre en cause l’usage de cet indicateur, compte entretenir un peu plus encore la confusion en en ajoutant deux supplémentaires : le DPI (Densité de Puissance Incidente) et le DPA (Densité de Puissance Absorbée).
Et de trois indicateurs…pour perdre totalement le consommateur
Le DPI (Densité de Puissance Incidente) et le DPA (Densité de Puissance Absorbée) – mesurés en W/m2 – s’ajouteraient ainsi au DAS – mesuré en W/kg – pour les fréquences de la 5G dans la bande des 26 GHz (ondes millimétriques).
Plus préoccupant…
Sur un plan métrologique, tout ceci est fait sans prendre en compte l’impossibilité actuelle de mesurer de manière fiable les conséquences des émissions combinées des différentes technologies et des différents émetteurs radiofréquences embarqués, les interactions des différentes antennes de fréquences censées cohabiter au sein d’un smartphone 5G millimétrique (2G, 3G, 4G, Wifi 5G…), les évaluations étant effectuées avec des unités de mesure différentes et des seuils réglementaires qui ne sont pas encore rendus publics pour les deux nouveaux indicateurs !
Dans quel autre domaine les impacts sur la santé se mesurent-ils à l’aune d’éléments aussi imprécis ? Nous nous interrogeons sur la véritable stratégie portée par l’ANFR et au-delà par les pouvoirs publics français et européens : on voudrait noyer le consommateur au milieu d’un flot de données illisibles que l’on ne s’y prendrait pas autrement.
Encore une fois, la protection de la santé des utilisateurs de téléphones portables semble reléguée au second plan, comme l’avait illustré au printemps la non prise en compte de nos commentaires lors de la consultation publique menée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) quant aux limites liées à la mesure de l’exposition des smartphones 5G. Nous avions d’ailleurs à la suite, en août 2022 et avec deux autres associations, déposé un recours contentieux, actuellement en cours d’examen, devant le Tribunal administratif de Melun.
Encore plus préoccupant…SPEAG, une entreprise et un dirigeant controversé
Un nouveau banc de mesure a donc été acquis par l’ANFR, visant à doter l’agence d’un moyen d’évaluer les densité de puissance incidente (DPI) et densité de puissance absorbée (DPA). Cet achat, d’une valeur de 700 000 €, a été fait auprès de la société SPEAG, unique postulant à l’appel d’offre émis par l’ANFR.
Alerte Phonegate connaît bien cette entreprise.
C’est une structure suisse qui profite d’une position quasiment monopolistique sur le marché des bancs de test DAS. Depuis 30 ans, elle fait obstruction à toutes les innovations et les évolutions techniques et normatives potentiellement défavorables aux intérêts des industriels.
Son Président, Niels Kuster, a sa part de responsabilité dans le scandale du Phonegate car, en tant que scientifique/expert, il sait que les mesures réalisées par son matériel, vendu aux laboratoires agréés, ne protègent que le portefeuille des fabricants de portables et certainement pas la santé des usagers.
Ainsi, Niels Kuster a souligné à plusieurs reprises la problématique des valeurs limites d’exposition dans certains de ses travaux de recherche, comme en 2015 dans un article publié dans Electromagnetics :
« Cela remet en cause l’applicabilité de ces études in vitro menées à des valeurs de DAS qui sont beaucoup plus petites que les expositions maximales réalistes, dont beaucoup n’ont signalé aucun effet ou des effets minimes dans le cadre d’une évaluation réaliste des risques. Afin de surmonter ce problème, dans les futurs essais in vitro, les études devraient inclure des niveaux de culture de DAS qui s’étendent à plus de 20W/kg… »
Mais cette alerte n’a débouché sur aucun résultat probant auprès des différentes agences et autorités publiques. C’est d’ailleurs dans son pays, la Suisse, que les autorités semblent toujours les plus réticentes à s’emparer du problème. Ces dernières ont confirmé tout récemment à Alerte Phonegate qu’il n’existait en Suisse aucune régulation ni protection de la santé des utilisateurs de téléphones portables.
« On se moque TOTALEMENT de la santé des utilisateurs de téléphones portables »
Pour le Dr Marc Arazi, président de l’association Alerte Phonegate à l’origine des révélations autour de ce scandale sanitaire et industriel majeur :
« On se moque totalement de la santé des utilisateurs de téléphones mobiles. Le DAS, indicateur habituellement utilisé pour mesurer le degré d’exposition aux ondes des portables, est une mauvaise référence, non respectée par les industriels du secteur et incompréhensible pour la plupart des gens. En ajoutant de nouveaux indicateurs tout aussi incompréhensibles, plutôt que de mettre en place des normes véritablement protectrices, l’ANFR et les autorités publiques entretiennent une confusion qui profite à nouveau aux entreprises du secteur au détriment de notre santé. ».
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